Parfois, on éprouve une sensation étrange. C’est comme une sorte de lassitude qui monte, une torpeur qui s’empare peu à peu de l’homme. Est-ce la température trop élevée ou trop basse ? Est-ce les conditions de vie trop dures ou trop faciles ? Ou tout simplement le monde et son tumulte incessant ? Alors les gestes se font plus lents ou plus lourds et les actes les plus évidents, les plus élémentaires paraissent porteurs d’interrogations. Et une question lancinante pénètre l’esprit : « A quoi bon ? » Cette simple formule, anodine en apparence, finit par prendre tant de puissance qu’elle parvient à détruire toute dynamique. On se prend à penser « à quoi bon tel acte positif, tel comportement généreux et profond, tel engagement dans ce qui donne son prix à la vie ? » Petit à petit, on échoue à trouver du sens aux choses et le goût d’accomplir n’est plus que nostalgie.
Il existe cependant un antidote à tout cela, quelque chose qui maintient l’enthousiasme de la vie dans sa pleine puissance. Cela s’appelle l’espoir. Mais il ne s’agit pas de se créer ainsi une illusion rassurante qui ne reposerait que sur une vision volontairement naïve, aveuglement qui n’ose pas dire son nom. Cet espoir-là est l’aspiration concrète à construire un édifice nouveau. Il affirme que l’homme est toujours en devenir et le monde avec lui. Il ne laisse pas passer les événements comme on laisse glisser l’insignifiance, il entreprend de les transformer.
N’est-ce pas là l’essence même de la judaïté et finalement de ce que nous sommes ? Ne jamais renoncer, se ressourcer dans le lien avec D.ieu, préserver en soi, au long du quotidien et même dans l’adversité, la volonté d’agir pour le bien : voilà donc les vertus naturelles à cultiver pour se défaire du « à quoi bon ? » Mais comment les obtenir quand tout invite au renoncement ? C’est ici qu’interviennent le choix et la liberté ultime de l’homme. Chacun détient en lui les forces de ce qu’il faut bien appeler un renouveau.
Le mot est connu, souvent cité par le Rabbi, « pense bien et tout ira bien. » Confiance aveugle ? Espérance irraisonnée voire déraisonnable ? Ou plutôt, le seul réalisme qui vaille ! Car, face aux tentations du « à quoi bon » et à ses abandons, il nous revient de dresser la grandeur de la conscience, la force de la volonté et l’infinie vision de l’espoir. De quoi changer le monde et tous ceux qui y vivent, à commencer par soi-même.
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